lundi 30 juin 2014

Andreï Makine, Le testament français

(Publié le 18 Décembre 2007)
Andreï Makine, Le testament français. Prix Goncourt et Prix Médicis en 1995.
"Sur notre balcon, nous entendions ce silence somnolent de ce Paris inondé. Quelques clapotis de vagues au passage d'une barque, une voix assourdie au bout d'une avenue noyée.
La France de notre grand-mère, telle une Atlantide brumeuse, sortait des flots".

Sur ce balcon de Saranza, Charlotte Lemonnier raconte à son petit-fils les souvenirs de sa jeunesse en France ; romans et poèmes, vieux journaux, petit cailloux et anecdotes introduisent dans le coeur du narrateur une "greffe française".

J'avais eu envie de découvrir ce roman lors de sa parution, mais j'ignore pourquoi je ne l'ai pas lu... Heureusement, une amie roumaine me l'a conseillé récemment. Il s'agissait de l'un de ses premiers coups de cœur littéraire quand elle est arrivée en France. En parler avec elle était très intéressant.
Le testament français est un roman qui croise les regards entre la Russie que connaît le narrateur, et une France imaginée grâce aux souvenirs de Charlotte et aux journaux. Mais ces regards sont déformés par la distance et par le temps : le narrateur croise Félix Faure, Marcel Proust, et d'autres grandes figures politiques ou littéraires françaises,  littérature dont il ne connaît évidemment que les "classiques", et décalage qu'il comprend à son arrivée en France.
Ce roman est surtout une approche de l'adolescence et une quête entre une identité russe et cette "greffe" française introduite par Charlotte, personnage fascinant et très émouvant.
Certains passages de son histoire sont bouleversants et même d'une violence dérangeante, voire insoutenable (je ne veux pas trop dévoiler l'histoire, et je citerai seulement le passage sur la seconde Guerre mondiale et les descriptions des blessés...)
Le style est très beau, poétique, très imagé et sensuel, sans devenir pesant, et réussit à transmettre beaucoup d'émotions.
J'ai noté une petite phrase sur la traduction, Charlotte remarque la richesse de la langue russe pour transcrire un poème de Baudelaire et ajoute : « Le traducteur de la prose est l'esclave de l'auteur, et le traducteur de la poésie est son rival ». Je ne suis pas traductrice, mais je me pose toujours la question pour la poésie...

Enfin, ce livre donne envie de se replonger dans les classiques, mais également de (re)découvrir la littérature russe, et personnellement celle de l'Europe de l'Est que je connais moins.

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